Je vois tes dessins et je ne les vois pas...

Guy Georges Voet De Keyser (1959)

Shantidas,

Je vois tes dessins et je ne les vois pas, car c'est toi que je vois, maître bien-aimé au grand cœur. J'aime tes grands arbres, non pour leur dessin, mais à cause de ta main qui les a longtemps caressés.

Je me demande souvent ce que tu aurais pensé de ceci ou cela, de celui-ci ou celui-là, et je me rends compte que j'ai déjà le même âge que toi quand tu avais ta longue barbe blanche. Je sais devoir répondre par moi-même, mais j'aimerais tant savoir ce que ton grand cœur limpide t'aurait fait dire.

Je ne t'ai jamais connu dans la chair, mais ton être me manque à jamais, et toujours plus. Prie pour nous tous, père bien-aimé de l'Arche, depuis ton ciel de lumière, de paix et de joie, car chez nous il fait presque nuit. J'embrasse ces mains dont tu disais :

Homme qui n’as pas vu mon visage de vie,
Connais mon vrai regard à travers ces mots-ci,
Ma stature et mon pas, mon souffle aussi,
Et l’exacte chaleur de mes deux mains amies.

(Le Chiffre des Choses, Liminaire)