La tombe de Lanza del Vasto

Raphaël Zacharie de Izarra (1965)

 

La sépulture de Lanza del Vasto, que jadis j’étais allé voir à la tombée du jour (à l’époque elle n’était là que depuis un lustre) est un poème tout simple dans un sous-bois, une minuscule nécropole où gisent quelques autres oiseaux rares. Une dalle devant laquelle se dresse un obélisque, dans un endroit perdu. Une parcelle de souvenir loin de tout, hors du temps, nulle part, juste sous la Lune.

C’est un lieu sans nom, paisible, intemporel, un asile pour l’esprit où la réalité est claire, humble, sereine. La tombe est là, entre friche et fourré. Nul bruit du monde extérieur ne vient briser l’harmonie rustique qui règne sur cette île où semblent voler de grandes âmes.

Je me revois encore, si loin dans le passé... Une atmosphère aérienne se dégageait des pierres, l’azur paraissait rayonner de la poussière, les cailloux tout autour du sobre sépulcre étaient comme des étoiles. J’avais vingt-et un ans, je ne possédais presque rien et marchais vers ce modeste but en compagnie de quelques fous de mon espèce, à la découverte des êtres, des astres, de l’indicible. Du vent ou bien de moi-même...

Ici les images deviennent plus vagues : le crépuscule rendait les éléments de plus en plus diffus, l’ambiance douce et mélancolique faisait croire à un rêve et je ne voyais plus que des ombres.

Mais quand vint la nuit, la lumière fut totale.